Les médias nous le répètent : Il n’y a jamais eu autant de chantiers routiers au Québec qu’en ce moment. Ce qui les conduit invariablement à nous rappeler qu’il faut ralentir lorsque l’on approche de travaux. Et à s’interroger pourquoi les québécois roulent si vite à leur approche. Avec pour seule réponse : les québécois sont des chauffards. Cependant, et si c’était la communication entourant les chantiers routiers qui était à revoir? 

 

Les québécois, d’incurables chauffards?

Le nombre de chantiers routiers étant en constante augmentation sur les routes du Québec, les médias ne cessent de répéter qu’il faut ralentir à leur approche. Le ministère des Transports a même lancé une campagne de sensibilisation à cet effet. Sans grand résultat. Les québécois semblent être d’incurables chauffards dès lors qu’ils approchent des chantiers routiers. Toutes les personnes interrogées par les journalistes sont incapables d’expliquer ce phénomène. Pourtant, qui prend sa voiture un temps soit peu et approche (fatalement) d’un chantier routier, pourra facilement expliquer cet état de fait.

Des problèmes de signalisation

La raison est simple : la signalisation avant et dans les chantiers est désastreuse. Clairement, elle n’est pas pensée, ou à peine. Si bien que les indications sont généralement très mauvaises. Tout d’abord, plusieurs chantiers ne sont tout simplement pas signalés et on arrive dedans sans le savoir. Ce qui est extrêmement dangereux. Mais les choses ne sont pas forcément meilleures lorsque signalisation il y a. Prenons l’exemple du pont Mercier (mais je pourrai prendre n’importe quel chantier) : Il est indiqué près d’un kilomètre avant le début du chantier de ralentir à 50km. On s’exécute. Mais un kilomètre à 50 km/h, c’est long. Si bien que peu à peu tout le monde reprend de la vitesse… et arrive trop vite lorsque le chantier débute.

Ce type de situation où l’on demande trop tôt aux conducteurs de ralentir est très commun. Trop. A tel point que plus personne ne fait confiance aux panneaux. Continuons ainsi avec le pont Mercier : Lorsque l’on quitte le chantier et que tout le monde reprend de la vitesse, un panneau indique de maintenir sa vitesse à 50 km/h. Mais pourquoi? Le chantier est terminé et il n’y a plus rien après. Là encore, la signalisation fait défaut et plus personne ne fait confiance aux panneaux.

Une surveillance policière quasi-inexistante

Autre point à ajouter : On a beau nous dire que nous roulons trop vite aux abords des chantiers, je n’ai jamais vu une seule voiture de police dans les parages! En fait, c’est à tel point que je me sens plus tranquille lorsque j’approche d’un chantier : je suis quasiment certain qu’il n’y aura aucune police dans les parages! Et j’imagine que je ne suis pas le seul à l’avoir constaté.

Cet abandon des chantiers par les corps policiers est très surprenant, tant on parle des problèmes de vitesse dans ces secteurs. Quand je suis allé aux États-Unis il y a quelques mois, sur un chantier sur deux au moins, il y a une voiture de police. Je peux vous dire qu’après avoir passé le premier chantier depuis la frontière, tout le monde se tient à carreau! Ajoutons à cela que la signalisation est mieux adaptée.

Bref, les solutions sont extrêmement simples si l’on veut que les québécois conduisent moins vite aux abords des chantiers. Il faut :

  • améliorer la signalisation
  • renforcer la surveillance policière

A vrai dire, je me demande ce que l’on attend. Concernant l’amélioration de la signalisation, le ministère des Transports devrait créer une unité spécialisée dans la signalisation. Elle aurait pour but de former les équipes disposant les panneaux de signalisation et de faire des contrôles. Elle pourrait aussi être en charge de répondre aux médias concernant la signalisation des chantiers. Il faut voir que plusieurs chantiers sont dangereux uniquement car les dérivations sont faites n’importe comment. Dans le contexte actuel, le chef de cette unité pourrait passer dans les médias pour expliquer la nouvelle stratégie du ministère : Couverture de presse favorable garantie!

 


Christian Leray

Christian Leray est le président de Prisme Média, une société spécialisée en analyse de presse. Il profite d'une expérience d'une dizaine d'années dans le domaine de l'analyse du contenu des médias. Il a notamment dirigé le Laboratoire d'analyse de presse Caisse Chartier de l'UQAM et a publié en 2008 un ouvrage aux Presses de l'université du Québec: L'analyse de contenu, de la théorie à la pratique.