Les Verts ne participeront pas au débat des chefs

Tel en a décidé le « consortium » des médias. C’est assez étonnant étant donné que tous les chefs des autres partis étaient d’accord pour que la chef des Verts, madame May, y participe. Mais il faut croire que le premier ministre du Canada et les autres chefs n’ont pas assez d’influence pour forcer le « consortium »!

D’ailleurs, on se demande qui dirige ce consortium, dont on ne sait finalement pas grand chose… Qui édicte les règles pour savoir quels critères de sélection doivent être retenus? Les médias semblent dans ce dossier avoir tous les pouvoirs…

Pour revenir aux chefs, il ne leur reste plus qu’à boycotter le débat pour montrer leur soutien à madame May. Mais je vous rassure, il n’en sera rien. En fait, Stephen Harper a d’abord déclaré qu’il était ouvert à toute forme de débat avant finalement de se rétracter le soir-même. Il a donc enterré lui-même sa propre proposition de rencontrer uniquement M. Ignatieff, le chef du parti Libéral! A ce sujet, il étonnant de voir cet article dans Cyberpresse : Ignatieff suggère un débat à deux, Harper dit non.

Médias sociaux

Les stratèges web 2.0 et autres experts médias sociaux suivent cette campagne avec attention, la question étant de savoir si les médias sociaux vont supplanter les médias traditionnels. Peut-être pas cette fois-ci. Mais il y aurait pourtant moyen de les faire intervenir : puisque le « consortium » a tous les pouvoirs sur ce que les citoyens ont le droit de voir, pourquoi ne pas en profiter pour faire un premier débat web 2.0? Celui-ci ne passerait pas sur les médias traditionnels et pourrait être retransmis sur les plate-formes des différents partis. Ou sur Youtube, Skype, des blogues et pourquoi pas Facebook. Les candidats pourraient même ne pas se trouver dans la même pièce.

La campagne électorale de 2011 resterait alors peut-être dans l’histoire comme étant la première au cours de laquelle le débat des chefs aurait eu lieu sur les médias sociaux. Cependant, face aux différents reculs de Stephen Harper sur la question, je doute que cette possibilité devienne réalité.

Media Agenda

La semaine passée je m’interrogeais à savoir quel parti remporterait les « journées médias ». Indiscutablement, les Conservateurs en ont été les champions. On sent qu’ils étaient prèts pour les élections. Chaque jour Stephen Harper fait une nouvelle proposition et chaque jour les partis d’opposition ne peuvent que réagir. Ils sont en train de se faire balayer et ont intérêt à réagir.

Un des derniers exemples en date : la promesse des Conservateurs de rembourser les dépenses en sport des adultes, comme cela se fait actuellement pour les jeunes. Les libéraux n’ont pu que répliquer en dénonçant son irréalisme. Mais pendant ce temps, M. Harper engrange en se faisant filmer en train de jouer au hockey avec des jeunes. A cette allure, M. Harper aura sa majorité dans trois semaines.

Origine des élections

D’autant que les médias (et donc la population) ont déjà oublié pourquoi on était en élections. Je mettais cela comme enjeu des premières heures de la campagne et je pense que je ne m’étais pas trompé : les médias rappellent désormais que les élections ont été déclenchées à cause du budget. Alors que c’est pour « outrage au Parlement » que l’opposition à déclenché les élections. Mais qui parle aujourd’hui du comportement des Conservateurs alors que l’on n’arrive même pas à réagir au flot de leurs annonces? Il s’agit pourtant là du véritable enjeu de cette campagne.

Le fait que les partis d’opposition ne réussissent même pas à le rappeler est le signe qu’à moins d’un miracle, les jeux sont faits. D’autant qu’il n’est déjà plus question de l’alliance que comptait élaborer M. Harper avec le Bloc québécois lorsque le Parti Conservateur était encore dans l’opposition! Et qu’il ait lieu sur les médias sociaux ou non, avec ou sans madame May, le débat ne changera rien à l’affaire.


Christian Leray

Christian Leray est le président de Prisme Média, une société spécialisée en analyse de presse. Il profite d'une expérience d'une dizaine d'années dans le domaine de l'analyse du contenu des médias. Il a notamment dirigé le Laboratoire d'analyse de presse Caisse Chartier de l'UQAM et a publié en 2008 un ouvrage aux Presses de l'université du Québec: L'analyse de contenu, de la théorie à la pratique.