Suite de notre réflexion sur notre impression d’être en démocratie. Après avoir écrit mon billet à ce sujet, et à la vue des suites du scandale sur les appels téléphoniques automatiques trompeurs j’ai continué d’y penser. Sans mener une enquête de fond (loin de là), je suis tombé sur le documentaire Hacking Democracy – (La démocratie piratée). Troublant.

 

 

Dans mon billet, je parlais du vote électronique et des risques associés. Car personne ne sait vraiment ce qu’il se passe avec les machines et les logiciels de vote. Il faut croire sur parole les constructeurs que leurs programmes sont parfaitement fiables. Pourtant, c’est très loin d’être le cas comme l’explique dans le documentaire Hacking Democracy la fondatrice de l’indispensable site Internet Black Box Voting. Celui-ci recense toutes les erreurs ou fraudes qui ont lieu lors des élections.

Et elles sont légion. Ainsi, le documentaire montre comment les constructeurs de machines de vote vendent les élections aux plus offrants! D’autres techniques ont cours, comme par exemple mettre trop peu de bureaux de vote dans les comtés peu favorables au candidat soutenu, si bien que beaucoup de gens ne peuvent voter. Tandis que des quartiers ou il y a pourtant peu d’électeur se voient attribués de nombreux bureaux de vote.

Les images prises lors des élections de 2004, entre Bush et Kerry, sont troublantes. On a parfois l’impression d’assister à un coup d’état… En 2000, des pratiques identiques ont été relevées, notamment en Floride. Dans son documentaire Fahrenheit 911 (évidemment contesté), Mickael Moore rapporte des images filmées au Congrès de représentants de Floride indiquant que de graves irrégularités avaient été constatées lors du vote.

Aujourd’hui, on a ce scandale des appels téléphoniques automatisés. En France, on utilise des machines de vote créées par les mêmes compagnies qui truquent (n’ayons pas peur des mots) les élections américaines. Pour l’élection présidentielle française, des millions de gens voteront par Internet. Et personne ne sera capable de dire s’il n’y aura pas eu de fraude. Le pire étant que dans des contextes budgétaires extrêmement serrés, on trouve le moyen de dépenser des millions pour acheter ces machines extrêmement onéreuses.

Clairement, il y a un très grave problème dans nos démocraties. Mais les journalistes n’ont pas l’air plus inquiets que ça. Ils se font désormais surveiller par la police et les services de renseignements, leurs téléphones sont mis sur écoute, on découvre leurs sources illégalement, on bafoue donc l’essence même de la démocratie en utilisant des techniques dignes de dictatures, mais pourtant on n’entend pas un mot plus haut que l’autre, ou à peine. Plus personne ne se lève pour dénoncer ces atteintes inqualifiables à nos droits les plus fondamentaux.

Et pendant ce temps, une vidéo sur un petit chef de guerre africain est vue par plus de 100 millions de personnes en moins de 6 jours. Il est loin le Watergate…  Aujourd’hui, Nixon pourrait dormir sur ses deux oreilles.

 


Christian Leray

Christian Leray est le président de Prisme Média, une société spécialisée en analyse de presse. Il profite d'une expérience d'une dizaine d'années dans le domaine de l'analyse du contenu des médias. Il a notamment dirigé le Laboratoire d'analyse de presse Caisse Chartier de l'UQAM et a publié en 2008 un ouvrage aux Presses de l'université du Québec: L'analyse de contenu, de la théorie à la pratique.